Gaïdz Minassian, enseignant à Sciences Po et spécialiste du Caucase, décrypte les conséquences de cet accord de cessez-le-feu total.
(…) Les Russes sont les grands vainqueurs parce qu’ils ont réussi à écarter la Turquie du jeu diplomatique. Moscou redevient l’arbitre régional. Poutine tient à nouveau les clés du règlement définitif. Ce qui n’était pas acquis, car ils ont d’abord été sonnés par l’irruption de la Turquie dans cette affaire. Ils ne s’attendaient pas à une telle ingérence turque dans le sud du Caucase et à un soutien militaire aussi massif auprès des Azéris. Ils ont mis du temps à évaluer la situation. Ils voulaient préserver deux choses : leur relation avec la Turquie, qui est un partenaire dans de nombreux domaines, et leur relation plutôt bonne avec l’Azerbaïdjan. Et puis, chez Poutine, il y avait une envie d’enquiquiner les autorités arméniennes. Le président russe n’a pas apprécié les quelques signes d’indépendance manifestés par le nouveau Premier ministre Nikol Pachinian. Ce dernier a, par exemple, fait emprisonner l’ancien président arménien Robert Kotcharian, qui est un proche de Poutine. Au moment où d’anciennes républiques soviétiques, comme la Biélorussie, jouent les mauvais élèves, Poutine n’est pas mécontent de remettre au pas Pachinian. La Russie se replace au centre. C’est une façon de dire aux Arméniens : « Regardez, si on n’était pas intervenus, vous perdiez tout. »
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